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Statut des cheminots : Zoom sur la réforme au coeur de la polémique

  • Photo du rédacteur: INFO MONDE
    INFO MONDE
  • 25 mars 2018
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 5 juin 2018



Le 26 février 2018, le Premier Ministre français Édouard Philippe présente la nouvelle réforme de la SNCF signant la fin du statut des cheminots pour les nouvelles recrues de l’entreprise ferroviaire. Une nouvelle réforme qui, aussi marquante soit-elle, représente un choix fort du gouvernement. En effet, si elle venait à être validée, elle mettrait fin à un statut fondamental pour les employés de la SNCF. Une prise de position qui n’aura pas manqué de provoquer de vives réactions dès les heures qui suivirent l’annonce du gouvernement, installant peu à peu le statut des cheminots au cœur de la polémique. Aussi, entre réforme gouvernementale et vague de grèves, quelles conclusions tirer de la réforme du statut des cheminots ? Zoom.


C’est un fait marquant qui survient fin février lorsque Édouard Philippe déclare la fin du statut des cheminots dans la nouvelle réforme gouvernementale. Pour rappel, le statut des cheminots qui existe depuis le XXème siècle, est un ensemble de garanties, de droits et d’avantages conférés à un employé en échange d’un travail particulièrement éprouvant. Dans le cas de la SNCF, cela concerne tout l’entretien des infrastructures ferroviaires ainsi que la conduite des trains vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.


Ce statut comprend donc divers avantages qu’il est nécessaire de détailler. Tout d’abord les employés de la SNCF sont à l’abris d’un licenciement puisqu'ils bénéficient d’un “emploi à vie”. Pour ce qui est du salaire, la SNCF précise que le salaire brut mensuel moyen des cheminots s’élève à hauteur de 3 090€ en 2014, pour un temps complet. À titre de comparaison le salaire mensuel moyen en France était de 2 912€ bruts en 2013. Concernant les retraites, le statut a subi de récentes modifications. En effet, si jusqu’en 2016 l’âge de départ à la retraite était de 55 ans pour les sédentaires (employés ne voyageant pas) et 50 ans pour les conducteurs, il en est aujourd’hui autrement avec un âge de départ repoussé pour les sédentaires et conducteurs, de respectivement 57 et 52 ans. Afin de se situer par rapport aux autres secteurs, les salariés du secteur privé, par exemple, partent à la retraite à partir de 62 ans.


Ajouté à cela, les cheminots mais aussi tous les employés de la SNCF bénéficiaient jusqu’alors de “facilités de circulation”, c’est-à-dire de billets gratuits ou des tarifs à prix réduit. Précisons que cet avantage vaut pour eux mais également pour leur famille puisque leur conjoint(e) et/ou enfants ont la possibilité de circuler pour 10% du prix du billet et ce pour n’importe quel trajet. Un avantage aussi appliqué aux parents et beaux-parents qui peuvent eux aussi voyager avec plusieurs billets gratuits par an.


Ce sont tous ces avantages associés à la fonction de cheminot auxquels le gouvernement souhaiterait mettre fin pour les nouvelles recrues de la SNCF et ce dès cet été. Une réforme qui n’a, comme attendu, pas manqué de provoquer de nombreuses réactions de mécontentement de la part de l’ensemble des syndicats de l’entreprise ferroviaire. Le 22 mars 2018, c’est la totalité des syndicats ferroviaires tels que la CGT, l’UNSA, le SUD-Rail, la CFDT et les FO-Cheminots qui appelèrent à la grève générale. Il est toutefois nécessaire de noter que l’élément de motivation des syndicats à organiser une telle grève nationale n’est pas seulement la possible réforme du gouvernement. Dans l’idée de faire au plus vite, le gouvernement pourrait légiférer par ordonnance pour appliquer cette réforme. Un moyen particulièrement critiqué car vu par beaucoup comme une forme de “déni de démocratie”, ce qui n’a pas manqué d’attiser la colère de l’ensemble des dirigeants des syndicats. Les syndicats qui, une nouvelle fois, privilégieront le rapport de force à d’éventuelles négociations.


Tête de cortége de la manisfestation des cheminots à Paris, le 22 mars

Le 22 mars 2018 fût sujet à une grève générale de la SNCF à l’échelle nationale. Au total c’est plus de 180 rassemblements qui ont vu le jour à travers la France. Du point de vue des chiffres, le nombre de manifestants total en France sera de 500 000 personnes selon la CGT. Un chiffre bien évidemment à nuancer puisque selon les autorités cette fois, c’est 323 000 manifestants qui se seraient répartis à travers le pays. Si de longs cortèges ont pu exercer leur droit de manifester, tout ne s’est pas vraiment déroulé dans le respect des règles puisque plusieurs dégâts sont à recenser. En effet à Paris, des heurts entre manifestants et forces de l’ordre ont eu lieu, durant lesquels les autorités ont été contraintes d’utiliser des canons à eau pour repousser les lanceurs de projectiles. Plusieurs vitrines de magasins ont également été vandalisées.


Du point de vue des transports à présent, la grève du 22 mars a fortement affecté la circulation habituelle des trains puisque ce jour-là, c’est environ 2 TGV sur 5 qui circulaient normalement. Perturbations notamment dues aux 35% de cheminots grévistes. Si ce premier rassemblement peut être perçu comme un signe positif pour les syndicats en vue de leurs revendications, ces derniers ne souhaitent néanmoins pas s’arrêter la. En effet, le 22 mars n’était que l’ouverture d’une série de grèves massives pour les trois prochains mois. La suivante étant programmée pour le 3 avril prochain. Le secrétaire adjoint de la CFDT-Cheminots, Rémi Aufrère-Privel, déclara même :


“Nous allons engager un conflit marathon : on ne pense pas que pour convaincre le gouvernement il faille un sprint”

Le rythme annoncé par les syndicats témoigne de leur volonté affichée : deux jours de mouvements de grève tous les cinq jours et ce pendant trois mois sont annoncés. Leur but étant de mobiliser sur la durée sans trop affecter les utilisateurs quotidiens à qui cette annonce devrait déplaire.


Cependant il est nécessaire de rappeler que cette réforme gouvernementale n’intervient pas à n’importe quel moment. En effet, la SNCF traverse une période où la dégradation de la qualité de leur service est pointée du doigt. Retards à répétitions, nombreux ralentissements, pannes géantes comme ce fût le cas par deux fois à la gare Montparnasse en 2017, sont autant de reproches adressés à la SNCF. Mais ce ne sont pas les seules raisons qui poussent le gouvernement à réagir. Aujourd’hui la SNCF coûte cher. Plusieurs estimations indiquent que les dépenses publiques en lien avec l’entreprise ferroviaire représenteraient un total de 17 milliards d’euros. Un chiffre qui, une fois décortiqué, représenterait : 10,5 milliards d’euros par an de subventions, 3,5 milliards d’euros utilisés pour le financement des retraites des cheminots et 3 milliards d’euros d’augmentation de la dette de l’entreprise ferroviaire.


Une dette de la SNCF qui augmente année après année et si le statut des cheminots en est en partie responsable de par l’ensemble des coûts qu’il inflige à l’entreprise, il est nécessaire de nuancer leur impact. Il faut noter que les récentes infrastructures ferroviaires ont coûté beaucoup plus cher que les précédentes, ce qui a fortement influé sur la dette. Le statut des cheminots en est donc en partie responsable mais n’est sûrement pas l’unique raison à l'augmentation de cette dette.


Une information dont il faudra évidemment tenir compte dans le suivi de l’évolution de la situation, aussi bien du côté des grévistes que du côté du gouvernement. L’avenir seul désormais pourra nous dire quelles conséquences ces confrontations auront, à la fois pour les cheminots mais aussi et surtout pour la SNCF dans son ensemble.

Crédits photos :

Photo de couverture : Ouest-France

Première photo : Le Monde

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